Certaines concomitances entre des événements d’actualité sonnent comme des coups de tocsin redoublés. Au moment où, vendredi 10 janvier, était rendu public le record de chaleur de l’année 2024, des quartiers entiers de la mégapole américaine Los Angeles étaient transformés en brasiers géants. Dans les deux cas, le changement climatique est à l’œuvre.
Le principal moteur de la surchauffe de 2024 réside dans l’accumulation des gaz à effet de serre issus de la combustion de charbon, de pétrole ou de gaz. Avec une température moyenne supérieure de 1,6 °C aux moyennes de la deuxième moitié du XIXe siècle, l’année passée fait craindre une violation de l’accord de Paris sur le climat signé en 2015, qui vise à limiter à 1,5 °C le réchauffement climatique – un objectif entendu sur au moins deux décennies. Du cyclone Chido à Mayotte aux inondations à Valence (Espagne), en passant par les incendies au Canada et les canicules aux Etats-Unis, cette poussée de fièvre a alimenté une cascade de catastrophes humaines et matérielles.
En Californie, le changement climatique a favorisé une combinaison de températures élevées, de sécheresse et de vents violents propices au transport des braises. En plein hiver, sur fond d’urbanisation galopante et de manque d’eau, la catastrophe a déjà causé la mort de 10 personnes, la destruction de milliers de bâtiments et l’évacuation de 130 000 habitants. De l’Europe du Sud au nord de l’Eurasie, de l’Australie à l’Amazonie, de la Sibérie au Canada, la fréquence et l’intensité accrue des vagues de chaleur créent aussi des conditions favorables aux mégafeux.
Comme si ces calamités en série ne suffisaient pas, la première puissance économique de la planète va introniser comme président, le 20 janvier, un homme qui qualifie le changement climatique de « canular », entend relancer la production de gaz et de pétrole, promet de faire de nouveau sortir les Etats-Unis de l’accord de Paris et de démanteler les mesures proclimat prises par son prédécesseur. En parallèle, en Europe, le retournement d’opinion sur le pacte vert menace de casser la dynamique enclenchée ces dernières années. Conséquences des erreurs et d’un manque de courage des politiques sur le Vieux Continent, ces reculades s’inscrivent aux Etats-Unis dans un virage idéologique et financier.
Signaux d’alerte
De façon inquiétante, la totalité des banques américaines viennent d’annoncer qu’elles renoncent à l’alliance globale des acteurs financiers visant à atteindre les objectifs de l’accord de Paris. A l’approche de l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, elles cherchent ainsi à retrouver des marges de manœuvre dans les financements des énergies fossiles, anticipant une demande d’énergie plus forte et durable que prévu.
« On peut toujours compter sur l’Amérique pour faire les choses correctement après avoir épuisé toutes les alternatives. » Au vu des orientations climatiques de Donald Trump, la phrase attribuée à Winston Churchill paraît bien optimiste. Brandies au nom de la grandeur des Etats-Unis, guidées par les profits, les décisions du futur président américain risquent d’entraîner la planète dans une spirale de catastrophes. Alors que les signaux d’alerte se multiplient sur tous les continents, son déni climatique enrobé de nationalisme risque de coûter bien cher aux peuples, américains compris. Et si l’Amérique décide un jour, ensuite, de « faire les choses correctement », il risque d’être trop tard.
