Jugée pour avoir rejoint trois fois une organisation djihadiste en Syrie par l’intermédiaire d’une filière britannique, une Française de 34 ans, Farrah Zerari, a été condamnée à neuf ans de prison par la cour d’assises spécialement composée de Paris, a fait savoir le Parquet national antiterroriste (PNAT) à l’Agence France-Presse (AFP), samedi 28 septembre.
Farrah Zerari était jugée pour participation à une association de malfaiteurs terroriste. Son nom avait émergé dès mai 2017 lors d’une enquête administrative en France. Elle avait été interpellée en janvier 2021, près de deux ans après son retour dans l’Hexagone.
Elle devient la vingtième femme condamnée en France depuis 2012 pour avoir rejoint une organisation terroriste, selon l’avocate générale, qui avait requis onze ans de réclusion assortie d’une période de sûreté des deux tiers.
Son procès, jeudi et vendredi, a permis de retracer son parcours : son enfance dans la région lyonnaise, marquée par des tensions avec sa mère et le divorce de ses parents, le début de l’adolescence et de son isolement à la suite d’un départ à Londres avec son père, coiffeur.
C’est le début des années 2000 et la capitale britannique, alors surnommée « Londonistan », voit quelque 850 individus de la mouvance radicale islamiste partir en zone irako-syrienne. Farrah Zerari, tout juste majeure et sortie d’une cure de désintoxication, sans diplôme, se tourne vers l’islam rigoriste. Entre 2013 et 2021, elle s’établit successivement en Turquie, à Dubaï, au Qatar, et effectue trois séjours en Syrie, ponctués d’escales en France, où elle met au monde deux enfants.
« Je n’entendais pas la guerre »
Elle décide d’épouser religieusement, par téléphone, un inconnu rencontré en ligne : Choukri Ellekhlifi, qu’elle retrouve en 2013 à Atma, ville proche de la frontière turque et gagnée par des conflits entre deux groupes djihadistes devenus rivaux, le Front Al-Nosra et l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), devenu Etat islamique.
Elle assure avoir découvert sur place que Choukri Ellekhlifi était un soldat, mais l’a « pr[is] comme il [était] ». Il meurt quelques jours plus tard. Selon la presse britannique, il appartient au Front Al-Nosra et a côtoyé Mohammed Emwasi, figure du groupe dit des « Beatles » de geôliers et bourreaux d’otages.
Quant à son second mari, Youssef Hassouni, dont elle devient la deuxième épouse quatre mois plus tard, « il fait la guerre », lâche l’accusée, jurant ne pas savoir à quelle faction il appartient. Il s’agirait de Daech (acronyme arabe de l’EI), selon les autorités britanniques.
Les enquêteurs français établissent que l’accusée s’est renseignée en ligne sur la participation des femmes au djihad et la mort en martyr. Une vidéo la montre en niqab (voile intégral couvrant le visage à l’exception des yeux), tirant à la kalachnikov.
Au procès, longue queue-de-cheval et jean, elle occulte les combats. « Je n’entendais pas la guerre », dit-elle. « A un moment de ma vie, j’ai été radicalisée », reconnaît-elle, mais sans « jamais avoir adhéré » à l’idéologie djihadiste.