Ils sont cinquante et un dans le monde et, faute d’une action coordonnée de l’Union européenne, leur situation en tant que victimes de la « diplomatie des otages » risque de s’aggraver tandis que d’autres personnes seront à leur tour menacées. C’est sur la base de ce constat que l’association apolitique Hostage Aid Worldwide (HAW) et l’ONG EU Watch tentent de convaincre les responsables européens de l’urgence de développer une stratégie face aux Etats et groupes criminels qui maintiennent illégalement des Européens en détention.
Présents à Bruxelles au cours des derniers jours, les responsables des deux organisations ont rencontré Janez Lenarcic, commissaire à l’action humanitaire, Sven Koopmans, représentant spécial de l’Union pour le Moyen-Orient, des eurodéputés, des diplomates français et allemands, ainsi que des membres du Service européen pour l’action extérieure. « Nous n’avons pas affaire à des incidents isolés, mais à une stratégie évidente qui, en transformant la prise d’otages en véritable arme, menace la paix internationale et la sécurité », leur a expliqué Nizar Zakka, le président de HAW. Ce Libanais, résident américain, a lui-même été enlevé en 2015 et incarcéré pendant quatre ans en Iran, où il avait été invité à prendre la parole pour une conférence.
HAW, installée à Washington, a été créée en 2020 par d’anciens otages, des membres de familles d’otages et des universitaires. Son dernier comptage indique qu’au 30 juin, 175 personnes au moins, dont 51 ressortissants d’un pays de l’UE, étaient détenues illégalement dans le monde. L’Iran, le Liban, l’Irak et l’Afghanistan sont actuellement les destinations les plus risquées pour des Européens, les étudiants, les défenseurs des droits humains, les journalistes et les universitaires étant, dans l’ordre, les plus exposés à une prise d’otage. L’Allemagne compte actuellement seize de ses ressortissants incarcérés illégalement, la France neuf : Cécile Kohler et son compagnon, Jacques Paris, en Iran, Guy-André Kieffer en Côte d’Ivoire, Hassine Bettaibi dans les Emirats arabes unis, Martin Ryan en Azerbaïdjan, Ofer Calderon à Gaza, Serge Atlaoui en Indonésie, en plus de deux anonymes dont les familles ne dévoilent pas les noms. L’un d’eux, « Olivier », est apparemment en Iran.
« Terrorisme d’Etat »
Depuis vingt ans, quelque 40 % des libérations auraient été obtenues par la négociation, 23 % par un échange ou le versement d’une somme d’argent. Dans les autres cas c’est une opération de sauvetage ou un geste de « bonne volonté » du pays ou du groupe concerné qui a permis le retour des détenus dans leur pays, relève encore HAW. « Il est temps de cesser de croire que chaque Etat agit mieux en agissant seul », estime Barry Rosen, ancien attaché de presse de l’ambassade américaine à Téhéran. Plongé au cœur de la « crise des otages » de novembre 1979 à janvier 1981, l’ex-diplomate estime avoir été l’une des premières victimes du « terrorisme d’Etat moderne ». « Il faut que les pays européens cessent de séparer la question de leurs otages de leurs autres champs d’action. Ils doivent développer une approche unifiée et créer de la dissuasion », soutient M. Rosen.
Il vous reste 40.12% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.