A moins de deux semaines de la présidentielle en Tunisie, l’Union européenne (UE) peine encore à définir une position cohérente vis-à-vis de Tunis et de son chef de l’Etat, Kaïs Saïed, grand favori du scrutin prévu le 6 octobre. Et pour cause, le président sortant a progressivement éliminé toute opposition politique. Seuls deux candidats, dont un est emprisonné, ont été autorisés à concourir.
Face à ce recul démocratique, Bruxelles s’interroge sur la meilleure attitude à adopter vis-à-vis de Tunis dans une note rédigée par le service diplomatique européen et communiquée le 7 juillet aux vingt-sept ministres des affaires étrangères, que Le Monde s’est procurée.
Les auteurs constatent que « les relations entre l’UE et la Tunisie sont devenues plus complexes », mais que « l’UE continue d’avoir un vif intérêt à préserver son partenariat avec la Tunisie afin d’assurer la stabilité du pays (y compris sur le plan socio-économique), de promouvoir le respect des droits de l’homme, de poursuivre une coopération efficace en matière de gestion des migrations et de maintenir son ancrage avec l’Europe ».
Mais pour cela, reconnaissent les auteurs du document, « il s’agira de trouver un difficile équilibre entre la crédibilité de l’UE en termes de valeurs et son intérêt à maintenir un engagement constructif avec les autorités tunisiennes ». Une sorte de statu quo qui laisse songeurs de nombreux acteurs, tant dans les institutions européennes que chez les défenseurs des droits humains.
« Arrestations de figures clés de l’opposition »
Depuis juillet 2021, le président Kaïs Saïed, élu en 2019, n’a en effet cessé de centraliser le pouvoir entre ses mains, éliminant progressivement tout contre-pouvoir institutionnel et restreignant toujours davantage le rôle de la société civile. Depuis 2023, « l’espace démocratique s’est considérablement réduit en raison des arrestations de figures clés de l’opposition et d’autres facteurs, tels que la marginalisation des partis politiques par la réforme de la loi électorale ».
Dans le même temps, « la liberté d’expression a été sévèrement restreinte », alors que le gouvernement envisage de revoir la législation sur les associations afin de restreindre encore leur indépendance, leurs activités et leur accès aux financements étrangers.
Le document pointe également la situation économique périlleuse du pays : « Il n’y a pas de stratégie économique claire ou débattue publiquement en vue, regrettent les diplomates européens. Cependant, la Tunisie ne devrait pas faire défaut sur sa dette extérieure à court terme. »
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