Les élections européennes du 9 juin montrent une forte progression d’ensemble du vote pour les partis populistes de droite. L’immigration a tenu une place centrale lors de la campagne, et plus particulièrement dans les pays (France, Pays-Bas, Autriche et Italie) où l’extrême droite est sortie renforcée. Cette corrélation traduit la capacité de l’extrême droite à capitaliser sur les craintes, exprimées par de nombreux électeurs, de déclassement économique et de dépossession culturelle face aux chocs de la mondialisation – immigration, concurrence commerciale, robotisation.
Comment envisager l’avenir de l’Union européenne (UE) en matière d’immigration dans un contexte de montée des populismes et de décrochage économique ? Le scénario qui se dessine pour l’UE est celui d’un cercle vicieux où immigration, vote pour l’extrême droite et déclin économique se renforcent mutuellement. Pour comprendre le fonctionnement de ce cercle vicieux, il faut d’abord en analyser les composantes : le lien entre immigration et vote populiste, entre populisme et performance économique et, enfin, entre extrême droite et structure par qualifications de l’immigration.
C’est faire preuve d’aveuglement que de ne pas voir que, de façon dominante, plus d’immigration, notamment non qualifiée, s’est traduit en Europe au cours des deux dernières décennies par plus de votes en faveur de l’extrême droite. Ceci n’exclut pas la possibilité de dynamiques locales positives, dites « de contact », mais celles-ci sont l’exception plutôt que la règle. Dans un article récent sur le lien entre vote populiste et mondialisation, nous montrions que l’immigration peu qualifiée, tout comme les importations de biens à fort contenu en main-d’œuvre peu qualifiée, se traduisent par une poussée du vote en faveur des partis populistes de droite et par un progrès des idées populistes telles que reflétées dans les professions de foi des partis traditionnels.
Cependant, notre étude montre également que la « mondialisation qualifiée », qu’il s’agisse de l’immigration ou des importations de biens à fort contenu en main-d’œuvre qualifiée, se traduit, au contraire, par une baisse significative du vote en faveur de l’extrême droite. La leçon fondamentale à retenir de cette étude est donc qu’il n’y a pas de fatalité dans la relation entre ouverture à la mondialisation et montée des extrêmes et que le contenu en qualifications de la mondialisation, qu’il s’agisse d’immigration ou de commerce, conditionne largement l’effet de celle-ci sur les votes.
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