Pour un observateur allemand, la situation dans laquelle se trouve le paysage politique français à la suite des élections législatives du 7 juillet est finalement assez peu déroutante. Du fait d’un mode de scrutin à finalité proportionnelle, les élections législatives allemandes ne désignent pas de vainqueur remportant la majorité des sièges au Bundestag. Depuis 1949, jamais un parti n’a gouverné seul. Le modèle allemand de la coalition ne nous fournira aucune solution miracle, tant la pratique du pouvoir diffère en France et en Allemagne. Mais nous pouvons quand même tirer quelques leçons de la comparaison.
D’abord, les coalitions allemandes sont de tailles réduites. Il est en effet rare (ce n’était plus arrivé depuis les années 1950) que ces alliances reposent sur plus de deux partis. Le gouvernement d’Olaf Scholz (Parti social-démocrate – SPD –, Verts – Grünen –, Parti libéral-démocrate – FDP) constitue en ce sens une exception, et sa fragilité s’explique, entre autres, par la nécessité d’articuler les attentes de trois partis différents. Plus une coalition fait entrer de groupes politiques en son sein, plus elle prête le flanc aux dissensions.
En ce sens, le cas français invite à la prudence, voire au pessimisme, tant le nombre de groupes politiques présents à l’Assemblée nationale va venir compliquer l’élaboration d’un compromis entre des partis aux idéologies souvent opposées, y compris au sein d’un même bloc politique, voir au sein d’un même parti. L’émiettement des forces politiques à l’Assemblée nationale n’a pas d’équivalent au Bundestag où seuls six partis siègent, dont deux – Die Linke à l’extrême gauche et l’AfD à l’extrême droite – ne sont pas considérés comme des options envisageables dans la mise en place d’un gouvernement fédéral.
Distance programmatique
Deuxième leçon, l’idéologie et les programmes politiques facilitent ou freinent la mise en place de coalitions. Durant les années Merkel, les grandes coalitions se sont en effet gouvernées au centre. Dans cette configuration, un des enjeux réside dans la distance programmatique à parcourir vers son adversaire de campagne devenu éventuel allié durant les négociations du futur gouvernement. Pour le SPD, à la suite des années Schröder (1998-2005), cette distance était relativement faible, bien moindre en tout cas que la distance séparant La France insoumise et Renaissance ou Les Républicains et le Parti socialiste. L’éventualité d’une grande coalition à la française semble en ce sens difficile à imaginer.
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