Le Soudan s’est embrasé. Dimanche soir, 16 avril, les tentatives de médiation du week-end avaient échoué à ramener le moindre espoir d’un retour au calme, laissant planer un peu plus la crainte de voir s’installer une guerre civile, allumée par un combat pour le pouvoir entre deux généraux associés, jusqu’ici, à la tête de la junte au pouvoir. Dès les premières heures de samedi, à la suite d’une longue montée des tensions, des combats avaient éclaté en plusieurs points du pays. Dans les principales villes, les Forces armées du Soudan (FAS, armée régulière) dirigées par le général Abdel Fattah Al-Bourhane, chef de la junte qui est à la tête du pays depuis 2021 (après un premier renversement de la dictature deux ans plus tôt), et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), mené par Mohammed Hamdan Daglo, dit « Hemetti » (également numéro deux de la junte), ont commencé à s’affronter pour le contrôle des bases militaires et d’aéroports. Depuis, les tirs d’artilleries, les échanges d’armes automatiques n’ont pas cessé, renforcés dans certains cas par des frappes aériennes.
Au cœur de la capitale, Khartoum, une guerre urbaine fait rage. Des petits groupes de soldats se font face. A pied, sur des pick-up ou des blindés surmontés de mitrailleuses et de canons antiaériens, les deux camps s’affrontent dans des rues désertes. Les habitants restent terrés chez eux, alors que des obus et des roquettes s’abattent sur des quartiers résidentiels.
La guerre a commencé si brusquement qu’elle a surpris de nombreux habitants loin de chez eux, comme cette centaine d’adolescents réfugiés dans les sous-sols de l’école Comboni, située à portée de tirs du palais présidentiel, autour duquel ont eu lieu des combats. Les collégiens passaient leurs examens lorsque les premières explosions ont retenti samedi. « On est bloqués, avec très peu de nourriture et d’eau, je ne sais pas combien de temps on va tenir », explique Arkan Ojoo, un professeur d’éducation physique de l’établissement, alors qu’au-dehors, les balles fusent.
« Deux fous »
Dimanche, aucun camp ne semblait parvenir à prendre l’avantage de manière décisive. Une guerre de l’information se joue depuis les premiers coups de feu, rendant difficile l’obtention d’une vue d’ensemble des avancées militaires. Avec leurs avions de chasse et leurs hélicoptères, les FAS restent maîtres du ciel. Les FSR ont échoué à prendre le contrôle de l’ensemble des bases aériennes de l’armée. Samedi, les paramilitaires avaient néanmoins pénétré dans l’aéroport international de Khartoum et disaient contrôler le palais républicain, nom du palais présidentiel. Mais la tendance semblait s’inverser dimanche dans la soirée après que les FAS ont multiplié les frappes aériennes, détruisant le quartier général des FSR. Le commandement des FAS a déclaré à plusieurs reprises durant le week-end que « la victoire [était] proche ». Mais dimanche, les FSR ont envoyé d’importants renforts dans la capitale et les combats ont redoublé d’intensité au nord de l’aéroport international, autour du quartier général des FAS incendié.
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