Un juge militaire américain a déclaré valable l’accord de peine négociée pour Khalid Cheikh Mohammed, considéré comme le « cerveau » des attentats du 11-Septembre, ainsi que pour deux coaccusés, une décision pourtant révoquée début août par le Pentagone après le fort émoi suscité auprès de nombreux proches des près de 3 000 victimes.
« Le juge militaire a décidé que les accords préalables à la procédure pour les trois accusés sont recevables et applicables », a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP) un responsable américain, sous condition d’anonymat. Cet accord, validé mercredi par le juge, devrait éviter à ces trois hommes, détenus sur la base militaire américaine de Guantanamo, la peine capitale.
Il n’était pas clair dans l’immédiat si les procureurs allaient faire appel de cette décision. « Nous examinons la décision et n’avons, pour l’heure, rien d’autre à ajouter », a indiqué, dans un communiqué, le porte-parole du Pentagone, le général Pat Ryder, trois mois après la révocation de ce même accord par le ministre de la défense, Lloyd Austin.
Khalid Cheikh Mohammed, Walid Ben Attash et Mustafa Al-Hawsawi sont accusés de terrorisme et du meurtre de près de 3 000 personnes dans les attentats sur le sol américain, un des épisodes les plus traumatiques de l’histoire des Etats-Unis. La plupart des gens connaissent Khalid Cheikh Mohammed grâce à la photo prise de lui le soir de sa capture, en 2003, les cheveux ébouriffés et la moustache touffue, vêtu d’un pyjama blanc.
Une « gifle » pour les familles de victimes
Les termes de l’accord n’ont pas été rendus publics. Selon le New York Times, Khalid Cheikh Mohammed, qui s’était vanté auprès d’enquêteurs d’avoir imaginé et organisé les attentats les plus meurtriers de l’histoire, et ses deux complices avaient accepté de plaider coupable d’association de malfaiteurs en échange d’une peine de prison à perpétuité, au lieu d’un procès qui aurait pu conduire à leur exécution.
Or, cette décision, annoncée fin juillet, avait choqué de nombreux proches de victimes et suscité de virulentes critiques dans le camp républicain, dans un pays en pleine campagne présidentielle. Le chef républicain de la Chambre des représentants, Mike Johnson, avait estimé que cette annonce faisait l’effet d’une « gifle » pour les familles de victimes.
« J’ai décidé, étant donné l’importance de la décision de conclure des accords de peines avant le procès avec les accusés (…), que la responsabilité d’une telle décision devrait me revenir », avait expliqué en août le ministre de la défense, Lloyd Austin. « Avec effet immédiat, dans l’exercice de mon autorité, je révoque ainsi les trois accords » de peine négociée, avait-il précisé. Quelques jours plus tard, le chef du Pentagone avait dit vouloir un procès : « les familles des victimes, les membres de nos forces armées et les Américains méritent de voir les procès de la commission militaire être tenus dans cette affaire », avait-il déclaré.
Anthony Romero, directeur de l’American Civil Liberties Union (ACLU), une puissante organisation de défense des droits civiques, a considéré, de son côté, que l’accord de peine négociée était « la seule solution possible » et que le chef du Pentagone avait « dépassé les limites » en l’annulant. « En tant que nation, nous devons aller de l’avant (…) pour donner aux familles des victimes des réponses à leurs questions », a-t-il ajouté dans un communiqué jeudi.
Prisons secrètes de la CIA
Les trois hommes n’ont jamais été jugés, la procédure devant les amener en procès s’étant enlisée autour de la question de savoir si les tortures qu’ils ont subies dans les prisons secrètes de la CIA entachaient les preuves à leur encontre.
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Les affaires portant sur le 11-Septembre se sont enlisées pendant des années et les accusés sont restés détenus dans la base militaire américaine de Guantanamo. Cette prison, où près de 800 prisonniers ont été détenus, a largement terni l’image des Etats-Unis à l’étranger. Joe Biden avait formulé le vœu de fermer Guantanamo, avant son élection. Mais la base militaire est restée ouverte.
Pakistanais élevé au Koweït, Khalid Cheikh Mohammed, dit « KSM » (S pour Sheikh en anglais), a été transféré à Guantanamo en septembre 2006. « J’étais responsable de l’opération du 11-Septembre, de A à Z », avait-il fièrement confessé devant le tribunal militaire. Il a aussi dit avoir été à la manœuvre dans une trentaine d’autres opérations, notamment des attentats liés à Al-Qaïda à Bali et au Kenya ainsi que le meurtre du journaliste américain Daniel Pearl.