L’image s’est tragiquement imposée d’une bande de Gaza retranchée du monde et réduite à un champ de ruines. L’oasis de Gaza a pourtant été durant des millénaires un carrefour prospère d’échanges et de commerce, à la frontière entre l’Asie et l’Afrique.
Une telle position stratégique a fait de Gaza la base des expéditions venues du Moyen-Orient à la conquête de l’Egypte, et ce bien avant Alexandre le Grand, au quatrième siècle avant notre ère. Mais tout pouvoir établi dans la vallée du Nil devait en retour s’assurer le contrôle de Gaza pour se lancer à l’assaut du Levant.
C’est ainsi que le général Bonaparte, dépêché par le Directoire à la tête de plus de trente mille soldats pour conquérir l’Egypte, à l’été 1798, se tourna ensuite vers Gaza. L’ambitieux chef de guerre rêvait en effet d’une vaste offensive prenant à revers Constantinople et les forces ottomanes en s’alliant le « tiers état » arabe contre la « noblesse » turque.
De Gaza à Jaffa et Acre
Napoléon Bonaparte incarnait déjà cette détermination à exporter par les armes les valeurs de la Révolution française, quitte à invoquer en Egypte une « nation » arabe dont le principe restait encore étranger à la majorité de la population locale.
Là où la solidarité islamique continuait de prévaloir, l’envahisseur français se posait en émancipateur des Arabes autochtones face à « l’oppression » turque du pouvoir ottoman. Alors même qu’il avait dû écraser un soulèvement antifrançais au Caire, en octobre 1798, il décida de s’emparer de Gaza, quatre mois plus tard. L’oasis était en effet le verrou, non seulement de la Palestine, mais de l’ensemble du Levant, que Bonaparte était résolu à conquérir pour attaquer par le sud l’Anatolie ottomane. Une fois les Français maîtres de la garnison ottomane d’Al-Arish, au nord-est de la péninsule égyptienne du Sinaï, la ville de Gaza se rendit sans combat.
Le général Bonaparte passa au moins une nuit de février 1799 au Palais du Pacha, la résidence du gouverneur ottoman, au centre de Gaza. Ce monument de pierre ocre deviendra en 2010 un musée d’histoire locale où les visiteurs, notamment les groupes d’écoliers, pouvaient se rendre dans la chambre occupée, deux siècles plus tôt, par le futur empereur Napoléon Ier.
Le Palais du Pacha a été détruit, en décembre, dans un bombardement israélien, comme tant d’autres sites historiques du patrimoine de Gaza, malgré leur absence de toute dimension militaire. Quant à Bonaparte, il ne s’attarde pas à Gaza pour mener ses troupes contre le port de Jaffa, bientôt conquis, puis celui d’Acre, qui résiste en dépit d’un siège acharné.
Il vous reste 52.81% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.