Les Etats-Unis ont annoncé, jeudi 12 septembre, une nouvelle salve de sanctions contre le Venezuela visant seize responsables proches du président sortant Nicolas Maduro, accusé de vouloir s’accrocher au pouvoir malgré sa défaite lors de l’élection du 28 juillet, selon Washington. Ces personnes comprennent des responsables du Conseil national électoral (CNE) et du Tribunal suprême de justice (TSJ), dont le juge et le procureur qui ont émis un mandat d’arrêt contre l’opposant Edmundo Gonzalez Urrutia, réfugié en Espagne depuis dimanche, selon des communiqués du département d’Etat et du Trésor.
« Plutôt que de respecter la volonté du peuple vénézuélien exprimée dans les urnes, M. Maduro et ses représentants ont faussement revendiqué la victoire tout en réprimant et en intimidant l’opposition démocratique dans une tentative illégitime de s’accrocher au pouvoir par la force », a déclaré le secrétaire d’Etat Antony Blinken, cité dans un communiqué. « Les Etats-Unis continueront à œuvrer pour que ceux qui sont responsables de saper la démocratie au Venezuela rendent des comptes », a-t-il ajouté.
Parlant à des journalistes, un haut responsable américain a déclaré, sous couvert d’anonymat, que Washington était convaincu de la victoire de M. Gonzalez Urrutia, soulignant qu’il existe « des preuves évidentes qu’il a remporté le plus grand nombre de voix lors de cette élection ».
Le président socialiste M. Maduro a été proclamé vainqueur de l’élection du 28 juillet avec 52 % des voix, mais, selon l’opposition, M. Gonzalez Urrutia a obtenu plus de 60 % des votes. Après l’annonce de la réélection de M. Maduro, des manifestations spontanées ont fait 27 morts et 192 blessés. Les Etats-Unis, l’Union européenne, ainsi que plusieurs pays d’Amérique latine ne reconnaissent pas la victoire du président sortant.
Une nouvelle « agression », selon Caracas
Caracas a immédiatement rejeté « avec la plus grande fermeté » des mesures jugées « illégitimes et illégales » et considérées comme une nouvelle « agression » de Washington, selon un communiqué du ministère des affaires étrangères.
Le Venezuela était déjà la cible de multiples sanctions américaines visant aussi le secteur pétrolier, et Washington s’efforce avec ces nouvelles sanctions de maintenir la pression sur Caracas. Les Etats-Unis ont aussi fait saisir, le 2 septembre en République dominicaine, un avion utilisé par M. Maduro. Des responsables américains reconnaissent cependant en privé que leur marge de manœuvre pour changer le cours des choses reste limitée.
Les responsables sanctionnés sont accusés d’avoir « entravé la transparence du processus électoral et la publication de résultats électoraux exacts ». « Le département du Trésor cible les principaux responsables impliqués dans les déclarations de victoire frauduleuses et illégitimes de M. Maduro et dans sa répression brutale de la liberté d’expression après les élections, alors que l’écrasante majorité des Vénézuéliens appelle au changement », a déclaré le secrétaire adjoint au Trésor, Wally Adeyemo.
Parmi eux figurent les juges Inocencio Antonio Figueroa Arizaleta, Malaquias Gil Rodriguez et Juan Carlos Hidalgo Pandares. Sont également visés Caryslia Beatriz Rodriguez Rodriguez, qui dirige le TSJ, et Antonio Jose Meneses Rodriguez, secrétaire général du CNE. Au total, quelque 140 responsables vénézuéliens ont été sanctionnés par les Etats-Unis, selon le Trésor. De son côté, le département d’Etat impose des restrictions de visas à des dizaines de responsables.
Les sanctions américaines ont pour effet de geler les avoirs éventuels de ces personnes aux Etats-Unis et interdisent toute transaction financière avec elles par le biais des banques ou institutions financières.
Vives tensions avec l’Espagne
De son côté, l’opposant vénézuélien M. Gonzalez Urrutia, réfugié depuis dimanche à Madrid, a été reçu par le chef du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez. Dans un message publié sur X après la rencontre, à titre privé, avec M. Gonzalez Urrutia, M. Sanchez a assuré que l’Espagne continuait « à œuvrer pour la démocratie, le dialogue et les droits fondamentaux du peuple frère du Venezuela ».
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Dans un communiqué transmis par son entourage peu après sa rencontre avec M. Sanchez, M. Gonzalez Urrutia a indiqué jeudi avoir fait part au responsable socialiste de sa « reconnaissance pour l’intérêt » qu’il porte « au rétablissement de la démocratie et au respect des droits de l’homme » au Venezuela. « Je lui ai réaffirmé ma détermination à poursuivre la lutte pour faire valoir la volonté souveraine du peuple vénézuélien exprimée le 28 juillet par plus de 8 millions d’électeurs », a ajouté M. Gonzalez Urrutia, qui ne s’était pas encore entretenu avec le responsable socialiste, jusque-là en voyage officiel en Chine.
La rencontre entre M. Sanchez et M. Gonzalez Urrutia est survenue quelques heures à peine après l’appel du président du parlement vénézuélien Jorge Rodriguez, chef de campagne de M. Maduro durant la campagne présidentielle, à rompre « toutes les relations » avec l’Espagne et à expulser l’ambassadeur et les consuls espagnols du Venezuela.
En cause : un vote du Parlement espagnol, qui a adopté mercredi une résolution déposée par le Parti populaire (droite), principale formation d’opposition à M. Sanchez, demandant au gouvernement de reconnaître M. Gonzalez Urrutia comme président du Venezuela. Cette proposition parlementaire n’a qu’une valeur symbolique, la décision de reconnaître ou non M. Gonzalez Urrutia comme président revenant à l’exécutif. Elle a malgré tout suscité de vives tensions avec Caracas.