Lorsque Don Cunningham était enfant, son père travaillait à l’aciérie, comme jadis ses arrière-grands-pères venus d’Irlande et de Slovénie. Un monde de fer et de charbon, celui des forges du XXe siècle, étalées sur plus de cinq kilomètres le long de la rivière Lehigh, à Bethlehem (Etats-Unis), au cœur de la Pennsylvanie.
« En tant qu’enfant de la classe ouvrière, je ne pouvais pas penser que l’aciérie ne soit pas là. Tout le monde avait un lien avec Bethlehem Steel, qui avait employé jusqu’à 33 000 personnes. Elle était trop gigantesque pour disparaître », confie Don Cunningham. Et pourtant, à la fin des années 1990, après ceux de Pittsburgh ou de Cleveland (Ohio), les hauts fourneaux ont fini par s’éteindre.
« J’étais un jeune maire de 31 ans, en fonctions depuis trois mois, et Bethlehem Steel a fermé, poursuit-il. J’avais été candidat, avec cette vision que tout était en train de mourir. Nous devions donc changer. » Changer, s’adapter, c’est la longue pente qu’a remontée Don Cunningham, aujourd’hui âgé de 58 ans et devenu entre-temps président de la Lehigh Valley Authority, un organisme chargé de promouvoir le développement économique de la région.
La renaissance de cette partie du pays est décisive pour l’avenir de l’Amérique. En 2016, la Pennsylvanie faisait partie de la Rust Belt, ces Etats désindustrialisés, de la « ceinture de la rouille », qui, avec le Michigan et le Wisconsin, donnèrent d’un cheveu la victoire présidentielle à Donald Trump. En 2020, Joe Biden parvint à l’y devancer de quelque 19 000 voix.
Cette année encore, cet Etat-clé pourrait faire l’élection. Joe Biden et Donald Trump le savent, ils y ont tous deux tenu des meetings de campagne. C’est lors de l’un d’entre eux, le 13 juillet, à Butler, que le candidat républicain a été victime d’une tentative d’assassinat. Avant même cet événement, qui a marqué les esprits et renforcé le camp républicain, les sondages penchaient en faveur de l’ex-président, qui devance de plusieurs points le démocrate.
Pourtant, la Pennsylvanie se redresse, notamment sous l’impulsion du nouveau gouverneur démocrate, Josh Shapiro. Agé de 51 ans, ce dernier inaugurait début mai une zone industrielle, coincée entre deux bretelles d’autoroute. « Nous allons transformer ce tas de terre en emplois », promettait alors l’élu, qui fait tout pour attirer des entreprises et rattraper son retard face à des Etats voisins, comme l’Ohio, New York et le New Jersey.
Plan de réindustrialisation
M. Shapiro a lancé en 2023 un plan de réindustrialisation de la Pennsylvanie, annonçant notamment une baisse de l’impôt sur les sociétés censé passer de 10 % en 2023 à 5 % en 2031. Surtout, il tente de limiter la polarisation politique extrême dans cette région, d’autant qu’il doit composer avec un Sénat local républicain et une Chambre des représentants démocrate.
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