Tous évoquent un accord « historique ». Depuis plus de six mois, le gouvernement de coalition, dirigé par la sociale-démocrate Mette Frederiksen, négociait avec le patronat, les syndicats d’agriculteurs et de l’industrie agroalimentaire, ainsi que l’Association danoise de protection de la nature. Lundi 24 juin, un compromis a enfin été trouvé, qui va permettre au royaume scandinave, très gros exportateur de viande et de produits laitiers, de devenir, à partir de 2030, le premier pays au monde à introduire une taxe carbone sur l’élevage.
Pour décrire l’accord, le ministre des affaires étrangères, Lars Lokke Rasmussen, chef de file du parti des Modérés (centre droit), un des trois partis de la coalition gouvernementale dirigée par la sociale-démocrate Mette Frederiksen, a filé la métaphore, le comparant à « une montre suisse » : chaque rouage ayant été choisi avec une infime précision, en modifier un seul risquerait de gripper tout le mécanisme. M. Rasmussen a donc encouragé l’opposition à voter le texte sans le modifier, rappelant la situation : « Nous sommes dans une Europe où les agriculteurs viennent brûler des pneus dans les grandes villes et où les défenseurs du climat se collent aux autoroutes. »
Dans ce contexte, la signature d’un tel accord semble presque relever du miracle. En février, un groupe d’experts, nommé par le gouvernement, avait proposé trois modèles, avec trois niveaux de taxe : 125 couronnes (16,70 euros), 375 couronnes ou 750 couronnes par tonne de CO₂. Ils devaient permettre de réduire les émissions de 2,4 à 3,2 millions de tonnes, avec une baisse de la production comprise entre 5,6 % et 15 % et la suppression de 2 000 à 8 000 emplois.
Le modèle retenu prévoit de taxer les agriculteurs à hauteur de 300 couronnes danoises par tonne de CO₂ à partir de 2030, puis 750 couronnes en 2035. L’accord, cependant, prévoit une déduction fiscale de 60 %, ce qui signifie que le coût réel par tonne de CO₂ sera en fait de 120 couronnes les premières années, puis 300 couronnes à partir de 2035. Les agriculteurs qui investissent dans des technologies permettant de réduire les émissions y échapperont. Les autres pourront bénéficier d’une aide à la transition, provenant d’un fonds alimenté par le produit de la taxe.
Pour Greenpeace, « un compromis faible »
« Je vais pouvoir dire à mes membres que leurs emplois existeront toujours demain. Bien sûr, ils seront remis en question, car une taxe énorme va arriver. Mais elle ne va pas voir le jour avant 2030 et il reste encore cinq ans », s’est réjoui le président du syndicat de l’industrie agroalimentaire NNF, Peer Sorensen. Son collègue, Soren Sondergaard, patron du syndicat de l’agriculture et de l’alimentation, se félicite pour sa part que « les agriculteurs qui utilisent des solutions climatiques approuvées et économiquement durables [pourront] échapper totalement à la taxe ».
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