Dans le programme que Donald Trump est en train d’appliquer à la tête de la première puissance mondiale, il est un dessein aussi cohérent qu’inquiétant : la contre-révolution masculiniste. Bien sûr, la loi du plus fort et les revendications territoriales procèdent de valeurs traditionnellement associées au masculin, comme l’a montré, à une autre époque, l’impérialisme européen.
Mais on manquerait la profonde originalité du trumpisme si l’on ignorait que, à cet instinct de prédation sur l’argent, l’environnement et les femmes, s’ajoute une volonté de reconquête fondée sur l’ego viril. Transfusant aux hommes l’esprit MAGA (Make America Great Again), le trumpisme promet la restauration de la « grandeur » masculine : pour enrayer le déclin d’une société censément émasculée, les hommes de pouvoir vont redonner le pouvoir aux hommes.
Cette reprise en main s’articule autour de cinq thèmes : la vertu de la violence, dont la finalité est d’intimider ou d’humilier l’adversaire, fût-il un contradicteur politique ou un dirigeant étranger ; le salut par la technique, entendue comme une « énergie masculine » (selon la formule de Mark Zuckerberg, fondateur de Meta) apte à balayer les règles du vieux monde ; l’essentialisation misogyne, suivant laquelle le destin des hommes est de mener le monde, tandis que les femmes sont chargées de les satisfaire ou de les servir ; les calomnies érigées en arguments, les injures en preuves, les mensonges en vérités, la vulgarité en savoir-vivre, au nom d’une « liberté d’expression » qui permet le déchaînement des haines sur les réseaux sociaux alliés comme X (ex-Twitter) et Meta (Facebook, Instagram) ; la réécriture de l’histoire à la manière de Thomas Carlyle (1795-1881), historien écossais du XIXe siècle et auteur des Héros, selon lequel une poignée de conquérants transforme le cours d’une humanité réduite à une masse informe. Le Groenland ou la planète Mars, telle sera la frontière de ces « grands hommes ».
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