Le clan des Shinawatra est de retour au pouvoir à Bangkok. A l’issue d’un vote au parlement, Paetongtarn – les Thaïlandais désignent leur politicien par leur prénom – a été élue à 37 ans, vendredi 16 août, à la magistrature suprême, par 319 voix sur 493, en remplacement du premier ministre Srettha Thavisin, destitué l’avant-veille. Mère de deux enfants, elle devient ainsi la plus jeune première ministre de l’histoire de son pays et la seconde femme, après sa tante Yingluck, renversée par l’armée en 2014, à diriger un gouvernement du royaume.
Fille cadette du patriarche de la dynastie, Thaksin Shinawatra, lui aussi détrôné, en 2006, par un coup d’Etat militaire après cinq ans au pouvoir et rentré d’exil en août 2023, Paetongtarn est la présidente du Pheu Thai, « Parti pour les Thaïlandais », le parti des Shinawatra. C’est donc le troisième membre de la famille à devenir premier ministre en vingt-quatre ans.
Paetongtarn avait été la favorite du parti dans les sondages durant la campagne des élections de mai 2023 mais sa formation avait terminé en deuxième position, loin de la majorité absolue espérée. L’autre candidat du Pheu Thaï, Srettha Thavisin, lui avait été préféré comme premier ministre dès lors que le parti avait choisi de former une coalition avec les vaincus du scrutin, ces mêmes généraux putschistes qui avaient renversé sa tante neuf ans plus tôt…
L’arrangement conclu permit alors le retour d’exil de Thaksin, installé à Dubai depuis 2008 : un pardon royal lui fut accordé, réduisant à un an les huit ans de prison auxquels il avait précédemment été condamné par contumace dans diverses affaires de corruption. Imposer une Shinawatra au pouvoir aurait cependant été difficile dans la mesure où Thaksin purgeait encore sa peine. Ce dernier semblait en outre vouloir préserver sa fille pour le coup d’après, d’autant que Paetongtarn était perçue comme manquant de maturité et d’expérience.
Retour par procuration
Un an plus tard, le paysage politique est en pleine recomposition à la suite d’une double décision de la Cour constitutionnelle, une institution au service des forces les plus conservatrices du royaume qui, depuis des décennies, impose ses diktats à la politique thaïlandaise. Elle a d’abord dissous, le 7 août, le parti Move Forward, arrivé en tête aux élections de 2023, au motif que ce dernier avait fait campagne en faveur d’une réforme de la loi de lèse-majesté – critiquée par toutes les organisations de défense des droits de l’homme pour les abus et l’instrumentalisation auxquels elle donne lieu dans cette monarchie constitutionnelle où le roi dispose de pouvoirs importants.
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