Si, collectivement, les pays d’Asie du Sud-Est peuvent espérer fournir une base de production alternative, ou complémentaire, à la Chine, celle-ci veille au grain. Elle consacre à la région de 650 millions d’habitants une part majeure de ses investissements en capital ou sous forme de « contrats » de construction financés par des prêts chinois dans le cadre des « routes de la soie » (Belt and Road Initiative, ou BRI). En prenant des parts substantielles dans ces économies, elle y devient incontournable. L’Asie du Sud-Est est aussi la destination privilégiée de sous-traitants chinois qui y suivent leurs clients : 37 % des 35 fournisseurs d’Apple au Vietnam sont des entreprises chinoises, selon une analyse du site japonais Nikkei Asia.
Quarante pour cent des investissements chinois dans toute l’Asie en 2023 se sont dirigés vers l’Asie du Sud-Est, selon un rapport de l’université Griffith de Brisbane (Australie) publié en mars. Le rebond post-Covid-19 de la BRI est toutefois sélectif : les Philippines, en conflit avec la Chine en mer de Chine du Sud, et la Birmanie, en pleine guerre civile, ont vu les investissements chinois se volatiliser.
L’Indonésie, première économie d’Asie du Sud-Est, en est, elle, la bénéficiaire numéro un : la Chine y finance de grands travaux d’infrastructures dans les transports (train à grande vitesse) et l’énergie (solaire et centrales à charbon). Elle y édifie au moyen d’investissements industriels colossaux une filière de transformation du nickel (Zhejiang Huayou Cobalt) et de fabrication de batteries électriques (CATL).
Eviter les taxes américaines
Partout en Asie du Sud-Est, le commerce électronique, dominé par le groupe chinois Alibaba et une poignée d’acteurs régionaux, a favorisé un afflux de produits chinois bon marché grâce aux accords de libre-échange avec la Chine. Quand, en 2023, la plate-forme chinoise TikTok a été frappée en Indonésie d’une interdiction de proposer dans ses clips des produits à la vente, le groupe a racheté la société d’e-commerce indonésienne Tokopedia pour 840 millions de dollars. L’Indonésie reste l’un des rares pays de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (Asean) à pouvoir se targuer d’échanges équilibrés avec la Chine – grâce à l’exportation de ses ressources naturelles. Les autres sont largement déficitaires.
La voiture électrique chinoise domine ce secteur en Asie du Sud-Est. Son premier marché, la Thaïlande, berceau de l’automobile japonaise « délocalisée », a ouvert les bras aux fabricants de voiture électrique : Chery est devenu le huitième constructeur chinois à obtenir, en avril, l’autorisation d’ouvrir une usine, après notamment BYD, MG, Great Wall Motor et Neta. Certains d’entre eux installent également des usines en Malaisie et en Indonésie.
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