mercredi, juin 5, 2024
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« Cette fois, il sera difficile de minimiser la portée du scrutin, tant il s’inscrit dans une dynamique d’ascension de Marine Le Pen »


Au regard des dernières enquêtes d’intentions de vote, la principale incertitude qui touche au scrutin du 9 juin ne porte pas sur la réalité de la tentation populiste en France, mais sur le niveau auquel elle va se concrétiser. La rapidité avec laquelle la liste du Rassemblement national (RN) conduite par Jordan Bardella s’est installée loin devant toutes les autres, sa capacité à rester durablement en pole position sans connaître jusqu’à présent le moindre trou d’air décrédibilisent les scénarios d’inversion de tendance. Le seul espoir de ses adversaires, à commencer par le parti présidentiel, qui fait figure de fragile challenger, est de profiter des quelques jours de fin de campagne pour tenter de réduire le handicap. Dans l’enquête Ipsos-Le Monde publiée lundi 3 juin, l’écart entre la liste RN (33 % des intentions de vote) et celle de Renaissance (16 %) atteint 17 points, ce qui est considérable, en comparaison avec le petit point qui séparait les deux listes il y a seulement cinq ans.

La probabilité d’une victoire bardello-lepéniste est telle que pour tous les acteurs politiques va se poser, dimanche 9 juin, la question du statut qu’il convient d’accorder à ces élections européennes, les seules à se dérouler, sur la scène nationale, au scrutin proportionnel à un tour. Préfigurent-elles une possible victoire de Marine Le Pen à la présidentielle en 2027, après trois échecs successifs ? Restent-elles, au contraire, un scrutin atypique dont il serait hasardeux de tirer la moindre leçon nationale ? On se doute que l’interprétation ne dépendra pas que du résultat. Elle sera intimement liée au jeu tactique des différents acteurs et au degré de lucidité qu’ils sont en mesure de produire.

A priori, la relativité s’impose dans l’appréciation des résultats, tant la logique du scrutin majoritaire à deux tours qui préside à l’élection présidentielle diffère de celle du mode de scrutin européen. Dans le premier cas, il s’agit d’acquérir une dynamique suffisante au premier tour pour viser le rassemblement le plus large au second. Dans l’autre, le jeu consiste à affirmer de bout en bout sa singularité, dans l’espoir d’être celui qui captera le mieux les attentes de l’opinion à l’instant T.

Vote sanction sans effet

Il en résulte un nombre important de listes – elles sont trente-huit –, souvent assorti d’une forte concurrence à l’intérieur de chaque camp, avec un risque non négligeable de déstabilisation des positions acquises. Deux écologistes, Daniel Cohn-Bendit en 2009, Yannick Jadot dix ans plus tard, ont ainsi réalisé une percée à l’occasion de scrutins européens. Mais, lorsqu’ils ont tenté de tirer parti de l’aubaine pour unifier leur famille politique et essayer de prendre le leadership sur la gauche, tout s’est débandé. Ils n’avaient pas les reins suffisamment solides pour parvenir à leurs fins.

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