Derrière la porte vitrée du vaste local de campagne du Parti démocrate à Easton, dans l’est de la Pennsylvanie, des rangées de pancartes électorales fixées sur deux tiges de fer reposent le long d’un mur. Ces « yard signs » typiques des campagnes électorales aux Etats-Unis ne verront pourtant pas, cet automne, les pelouses du comté de Northampton. Elles sont devenues des vestiges du passé le 21 juillet, le jour où Joe Biden, qui y figure encore comme candidat démocrate à la présidentielle avec Kamala Harris comme colistière, a renoncé à se représenter au profit de cette dernière.
L’effigie de carton, grandeur nature, du président et de sa vice-présidente, côte à côte, a été également condamnée ce jour-là à l’obsolescence. Il reste au jeune permanent de service, qui n’est pas autorisé à s’exprimer ni à laisser entrer les visiteurs, une Kamala Harris en tailleur sombre qu’il transporte obligeamment devant le local. Il faudra attendre encore quelques jours et le choix d’une ou d’un colistier pour qu’un nouveau « ticket » démocrate puisse être décliné sur tous les supports de campagne à la disposition des militants du comté.
Venue avec son compagnon, ce 26 juillet, flâner dans le centre-ville coquet d’Easton, Eileen Hessmiller, enregistrée comme démocrate sur les listes électorales, ne cache pas le soulagement qu’a suscité, pour elle, le renoncement de Joe Biden. Le président sortant n’avait jamais été en mesure d’effacer sa prestation catastrophique lors du débat avec Donald Trump, le 27 juin, au cours duquel il avait donné l’impression d’une grande confusion, alimentant les interrogations sur son état de santé et sa capacité à l’emporter face au républicain.
« Un réflexe d’unité »
« C’était une décision logique, mais jusqu’au bout j’ai pensé qu’il ne la prendrait pas », confie cette informaticienne retraitée. Son compagnon, Rob Marshall, ancien géologue et également proche des démocrates, s’interrogeait lui aussi sur les intentions du président sortant. « Les sondages n’étaient pas bons, c’est sûr, reconnaît-il. Mais qu’est-ce qu’ils valent aussi loin des élections ? Sans parler des conditions de réalisation… Qui décroche pour répondre quand un numéro inconnu apparaît sur votre téléphone, avec toutes ces arnaques ? ».
Responsable du Parti démocrate pour le comté, Matt Munsey était quant à lui totalement opposé à un changement de candidat dans la dernière ligne droite de la campagne. « Ceux qui imaginaient des candidatures alternatives évoluaient dans une réalité virtuelle de jeu vidéo », estime-t-il. Il redoutait que le retrait de Joe Biden ne déclenche une guerre interne. Le ralliement en un temps record de l’écrasante majorité des cadres démocrates derrière Kamala Harris a complètement dissipé ses craintes. L’ancien président Barack Obama a aussi annoncé son soutien vendredi. « J’étais sûr qu’il y aurait, le cas échéant, un réflexe d’unité, et on en a eu vite la preuve, constate de son côté Robert Freeman, un cacique démocrate élu à la Chambre de l’Etat. Il était impensable que le témoin ne passe pas logiquement à la vice-présidente. »
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