Plus d’une semaine après avoir été renversé, l’ex-président syrien, Bachar Al-Assad, est sorti lundi 16 décembre de son silence, affirmant qu’il n’avait fui la Syrie qu’après la chute de Damas aux mains d’une coalition rebelle et qualifiant les nouveaux dirigeants du pays de « terroristes ». Le 8 décembre, une alliance insurgée menée par le groupe islamiste radical Hayat Tahrir Al-Cham (HTC) est entrée à Damas et a annoncé le renversement du pouvoir, après une offensive fulgurante qui lui a permis de s’emparer d’une grande partie du pays en onze jours. Lâché par ses alliés iranien et russe, M. Al-Assad a fui à Moscou.
« Mon départ de Syrie n’était pas planifié et n’a pas non plus eu lieu durant les dernières heures de la bataille, contrairement à certaines allégations », affirme le président renversé dans un communiqué en anglais diffusé sur la chaîne Telegram de la présidence syrienne. « Moscou a exigé (…) une évacuation immédiate vers la Russie le dimanche 8 décembre au soir », ajoute Bachar Al-Assad.
La Russie intervenait militairement depuis 2015 en Syrie, où la guerre a commencé en 2011 avec la répression brutale de manifestations prodémocratie. « Dans une telle situation, ce ne serait pas bien du tout de ma part de détailler ce qui s’est passé et comment ça s’est passé mais [Bachar Al-Assad] est sécurité », avait expliqué Sergueï Riabkov, le vice-ministre des affaires étrangères russe, confirmant dans une interview à NBC que Bachar Al-Assad avait trouvé refuge en Russie. « Cela montre que la Russie agit comme il se doit dans une telle situation extraordinaire », avait-il ajouté, sans préciser le rôle joué par la Russie dans la décision d’exfiltrer le dictateur syrien. Bachar Al-Assad, qui a dirigé d’une main de fer la Syrie pendant vingt-quatre ans, affirme désormais que son pays était « aux mains des terroristes ».
Missions diplomatiques
HTC, ex-branche syrienne d’Al-Qaida, affirme avoir rompu avec le djihadisme mais reste classé comme une organisation terroriste par plusieurs capitales occidentales, dont Washington. Après cinquante ans de règne sans partage du clan Al-Assad et d’une répression implacable contre tout opposant ou présumé tel, les nouvelles autorités s’emploient à rassurer la communauté internationale, et les chancelleries prennent peu à peu contact avec leurs dirigeants, dont Ahmed Al-Charaa, de son nom de guerre Abou Mohammed Al-Joulani, le chef de HTC.
Lundi, l’Union européenne (UE) a annoncé envoyer un haut représentant à Damas pour rencontrer les nouveaux dirigeants. L’UE jugera sur les actes « allant dans la bonne direction », a déclaré la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas. La veille, l’envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, Geir Pedersen, a rencontré M. Al-Charaa, auprès de qui il a souligné la nécessité d’une transition « crédible et inclusive », selon ses services.
Le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont également annoncé avoir établi des contacts avec HTC, et la France a annoncé qu’elle enverrait une mission diplomatique mardi à Damas, la première depuis douze ans. La Turquie voisine, acteur majeur dans le conflit en Syrie et soutien des nouvelles autorités, a rouvert samedi son ambassade à Damas, se disant « prête » à fournir de l’aide militaire si le nouveau gouvernement syrien le lui demandait.
Le nouveau premier ministre chargé de la transition jusqu’au 1er mars, Mohammad Al-Bachir, a promis de « garantir les droits de tous », alors que les Syriens tentent de reprendre une vie normale.