Les Britanniques ont une tendance curieuse, du moins vue de France : ils votent pour les partis politiques qui s’engagent à réduire les dépenses budgétaires. C’était le cas en 2010, quand le gouvernement conservateur de David Cameron a été élu sur une promesse d’austérité, puis réélu en 2015 de la même façon.
Dans une moindre mesure, l’histoire semble se répéter avec les élections législatives organisées le 4 juillet. A en croire les sondages, qui leur donnent vingt points d’avance, les travaillistes sont sur le point de revenir au pouvoir après quatorze ans d’opposition. Dans une volonté de recentrage politique, leur leader, Keir Starmer, a tout fait pour promettre à son tour le sérieux budgétaire.
Tout en assurant qu’il améliorerait les services publics, il s’engage à respecter le cadre budgétaire mis en place par les conservateurs, à savoir une baisse de la dette publique d’ici à cinq ans. Il promet aussi de n’augmenter ni l’impôt sur le revenu, ni la TVA, ni les cotisations sociales. En face, les conservateurs ont promis de réduire les impôts d’environ 16 milliards de livres (19 milliards d’euros).
Des chocs successifs
Derrière cette grande prudence se trouve une situation budgétaire très détériorée, étrangement comparable à celle de la France. Malgré l’austérité menée de 2010 à 2016, la dette publique britannique a fait un bond spectaculaire de 64 % du produit intérieur brut (PIB) en 2008 à 101 % en 2023 (la France est à 110 %). Son déficit en 2023 était de 6 % du PIB (la France est à 5,5 %).
« Quel que soit le prochain gouvernement après les élections, il fait face à des choix très difficiles : soit augmenter les impôts plus qu’il ne le dit dans son programme, soit couper dans les budgets, soit emprunter plus et laisser la dette augmenter. Voilà le “trilemme” », estime Paul Johnson, le directeur de l’Institute for Fiscal Studies, un groupe de réflexion spécialisé dans les comptes publics britanniques. « La dynamique de la dette britannique est similaire à celle de l’Italie, pays régulièrement en difficulté », ajoute Andrew Goodwin, du cabinet Oxford Economics.
Comme partout ailleurs, les finances publiques britanniques ont subi les chocs successifs de la pandémie et des prix de l’énergie. Mais M. Johnson ajoute d’autres facteurs d’explication : une forte hausse du service de la dette (une large partie des obligations du pays sont indexées sur l’inflation et ont donc coûté très cher ces dernières années), une augmentation des dépenses sociales, notamment pour les personnes âgées, et enfin une faible croissance.
Il vous reste 57.42% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.