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En Corée du Sud, le président Yoon Suk Yeol lâché par son propre parti, l’opposition campe dans le Parlement


Un manifestant tient une affiche avec une image du président sud-coréen, Yoon Suk Yeol, lors d’un rassemblement appelant à la destitution du chef de l’Etat, à Séoul, le 5 décembre 2024.

Il ne reste plus beaucoup de prise au président sud-coréen, Yoon Suk Yeol, pour s’accrocher au pouvoir, après sa brusque tentative ratée d’imposer la loi martiale dans le pays. Alors que le Parlement doit voter la destitution du chef de l’Etat, le leader de son propre parti lui a retiré son soutien.

« Si le président Yoon continue d’occuper le poste de président, il existe un risque important que des actions extrêmes similaires à la déclaration de la loi martiale soient répétées, ce qui pourrait mettre la République de Corée [nom officiel de la Corée du Sud] et ses citoyens en grand danger, a déclaré, vendredi 6 décembre, Han Dong-hoon, chef du Parti du pouvoir au peuple (PPP). Au vu de nouveaux éléments, je crois qu’une suspension rapide du président Yoon Suk Yeol est nécessaire afin de sauvegarder la République de Corée et sa population. »

Craignant un nouveau coup de force du président, qui a disparu de l’espace public depuis mercredi à l’aube, les députés d’opposition ont décidé de camper dans le Parlement jusqu’à l’examen de la motion de destitution prévu samedi soir. Des manifestations pour réclamer le départ de M. Yoon devraient au même moment, selon la police, rassembler des « dizaines de milliers de participants » devant le Parlement et dans le centre-ville de Séoul. Les organisateurs prévoient pour leur part 200 000 manifestants.

Le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, s’est dit « confiant » quant à la « résilience démocratique » de la Corée du Sud, lors d’un premier entretien téléphonique avec son homologue sud-coréen, a rapporté son porte-parole vendredi. Selon le communiqué complet publié par le département d’Etat, M. Blinken a ajouté que « le peuple américain était solidaire du peuple de la République de Corée et continuerait à l’être face à toute provocation ou menace à l’égard de l’Alliance ».

Yoon Suk Yeol avait ordonné l’arrestation de dirigeants politiques

Yoon Suk Yeol avait proclamé par surprise la loi martiale, tard mardi, et fait déployer l’armée à Séoul. Il avait expliqué avoir déclaré cet état d’exception pour protéger « la Corée du Sud libérale des menaces des forces communistes nord-coréennes et pour éliminer les éléments hostiles à l’Etat », dans un contexte de bras de fer sur l’adoption du budget 2025.

Il avait été obligé de rétropédaler six heures plus tard après un vote du Parlement réclamant à l’unanimité la levée de loi martiale, et sous la pression de la rue.

Dans son discours en forme de réquisitoire, M. Han a évoqué, vendredi, des « preuves crédibles » que le président avait ordonné l’arrestation de dirigeants politiques de premier plan dans la nuit de mardi à mercredi. « Le président Yoon Suk Yeol a demandé au chef du commandement du contre-espionnage (…) d’arrêter des politiciens importants, en les qualifiant de forces antiétatiques, et il a mobilisé les agences de renseignement » pour le faire, a-t-il affirmé.

Selon le député d’opposition Jo Seung-lae, les images des caméras de surveillance du Parlement montrent que les militaires cherchaient à arrêter le chef du Parti démocrate (la principale force d’opposition), Lee Jae-myung, le président de l’Assemblée nationale, Woo Won-shik, et même M. Han. Le bureau de M. Yoon a assuré que ce dernier n’avait « pas donné l’ordre d’arrêter ni de placer en détention des membres de l’Assemblée nationale », selon l’agence de presse nationale Yonhap.

« Nous recevons de nombreuses informations concernant une seconde loi martiale. Jusqu’au vote de la loi de destitution samedi, tous les membres du Parti démocrate demeureront dans le bâtiment principal de l’Assemblée nationale », a également déclaré M. Jo. M. Woo, le président du Parlement, a promis de « défendre l’Assemblée nationale et de protéger le peuple et la démocratie » en cas de nouveau coup de force.

Suspension de trois hauts gradés

Le ministre de la défense par intérim, Kim Seon-ho, a démenti les rumeurs de nouvelle loi martiale. « C’est complètement faux », a-t-il déclaré. « Et même s’il y a des demandes pour imposer la loi martiale, le ministère de la défense et l’état-major ne les accepteront absolument pas. » Vendredi matin, le ministère de la défense a par ailleurs annoncé la suspension du commandant militaire de la capitale, de celui des forces spéciales et de celui du contre-espionnage, pour leur participation dans les opérations pendant la loi martiale.

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Si M. Yoon ne démissionne pas d’ici là, le vote au Parlement sur la destitution du président est prévu samedi 7 décembre à 19 heures heure locale (11 heures, heure à Paris), selon Yonhap. Jeudi, Han Dong-hoon avait affirmé que le parti présidentiel ferait front contre la motion, mais ce changement de discours semble garantir son succès, alors que l’opposition, majoritaire au Parlement, n’a besoin de rallier que huit élus du PPP.

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Si le Parlement approuve, aux deux tiers – soit 200 voix sur 300 membres –, la destitution de M. Yoon, ce dernier sera suspendu, dans l’attente que la Cour constitutionnelle valide sa destitution. Une nouvelle élection présidentielle devra alors être organisée dans les soixante jours. L’intérim serait alors assuré par le premier ministre, Han Duck-soo.

Visé par une enquête pour rébellion

La cote de popularité de Yoon Suk Yeol a atteint un plus-bas de 13 %, selon un sondage Gallup publié vendredi. Le président n’a pas été vu en public depuis son annonce de la levée de la loi martiale aux premières heures, mercredi. Il est visé par une enquête pour « rébellion », a dit la police jeudi. « C’est un crime impardonnable, qui ne peut pas, ne doit pas et ne sera pas pardonné », a tonné Kim Seung-won, député du Parti démocrate.

Ce crime est théoriquement passible de la peine de mort, qui n’est cependant plus appliquée en Corée du Sud depuis 1997.

Les manifestations de milliers de Sud-Coréens devant les lieux de pouvoir se multiplient depuis mercredi pour réclamer le départ de M. Yoon.

Jeudi, son cabinet a annoncé la démission du ministre de la défense, Kim Yong-hyun. Mais d’autres responsables-clés de son gouvernement s’accrochent, dont le ministre de l’intérieur, Lee Sang-min. L’opposition cible également d’autres alliés de poids de M. Yoon, dont l’éphémère commandant de la loi martiale, Park An-su, chef d’état-major de l’armée.

Le Monde avec AFP

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