Jeudi 3 octobre, c’est une des ultimes pages de l’histoire coloniale britannique qui s’est tournée, avec la cession par le Royaume-Uni des îles Chagos, un archipel isolé du nord de l’océan Indien, à la République de Maurice. L’Etat insulaire réclamait sa souveraineté sur ce groupe d’atolls paradisiaques depuis plus de cinquante ans. En échange de la rétrocession de ces îles, Maurice s’est engagé auprès de Londres à garantir la présence sur le principal atoll des Chagos, Diego Garcia, d’une base militaire louée par les Britanniques aux Etats-Unis. L’armée américaine y stationne des navires de guerre et des bombardiers.
Le ministre des affaires étrangères britannique, David Lammy, a réagi jeudi, estimant que l’accord « garantit la pérennité de cette base militaire vitale. Cela renforcera notre rôle dans la sauvegarde de la sécurité mondiale, éliminera toute possibilité que l’océan Indien soit utilisé comme une dangereuse route migratoire illégale vers le Royaume-Uni et garantira notre relation à long terme avec Maurice, un proche partenaire du Commonwealth ». Diego Garcia héberge des demandeurs d’asile venus du Sri Lanka, qui devraient se retrouver sous la responsabilité de Maurice.
En 1968, le Royaume-Uni, en plein démantèlement de son empire, avait accordé l’indépendance à Maurice, mais refusé de lui céder les îles Chagos. Les Britanniques avaient même chassé 1 500 à 2 000 Chagossiens des atolls pour installer la base militaire de Diego Garcia. « Nous n’avons pas les yeux bleus, c’est pour cela qu’on nous chasse », « notre traitement est inhumain », témoignaient à la BBC au début des années 1970 quelques-unes de ces personnes expulsées de leurs terres, dans un document sonore rediffusé le 3 octobre sur la BBC Radio 4.
Une partie de la droite proteste
La République de Maurice (1,2 million d’habitants) a porté le contentieux devant les instances internationales. Entre 2019 et 2021, la Cour internationale de justice, l’Assemblée générale de l’ONU et le Tribunal international du droit de la mer ont tous reconnu la validité de ses revendications territoriales. Pour en finir avec un différend qui ternissait la réputation du Royaume-Uni, notamment vis-à-vis des Etats africains, le gouvernement conservateur de Rishi Sunak s’est résolu à entrer en négociations avec celui de Maurice, en novembre 2022.
Quand il est arrivé à Downing Street, en juillet, le travailliste Keir Starmer a décidé d’accélérer le processus, confiant les pourparlers à Sir Jonathan Powell, un diplomate d’expérience, qui mena les négociations de paix en Irlande du Nord pour Tony Blair. Une partie de la droite britannique a protesté, jeudi, reprochant au Labour un supposé manque de patriotisme.
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