LETTRE DE KIEV
L’opération n’est pas encore terminée qu’une exposition à Kiev lui est déjà consacrée. Il n’aura fallu qu’un mois après le déclenchement de l’offensive ukrainienne sur la région russe de Koursk, le 6 août, pour que le plus grand musée de la capitale ouvre un parcours revenant sur ses premières semaines. « Nous avons besoin de suivre la dynamique de la guerre jour après jour », justifie avec une pointe de fierté Yuriy Savchuk, directeur depuis 2021 du musée national de l’histoire de l’Ukraine durant la seconde guerre mondiale, mercredi 18 septembre.
L’exposition, qui débute sur l’histoire des régions frontalières de l’Ukraine et de la Russie au cours des siècles derniers, est composée de photos prises dans la région de Koursk et de quelques objets récupérés sur le sol de la Fédération de Russie. Les visiteurs peuvent y découvrir un morceau du nez d’une statue à l’effigie de Vladimir Ilitch Lénine, explosé par une frappe de drone dans les combats, une affiche du film américain Borderlands (terres frontalières), projeté dans le cinéma de la petite ville russe de Soudja, un panneau de signalisation indiquant les directions opposées de la Russie et de l’Ukraine… Tout un symbole.
Fait inédit, les pièces présentées ont été collectées par le directeur du musée lui-même, qui s’est faufilé dans la région de Koursk à partir du 15 août, neuf jours après le début de l’attaque, en compagnie d’un jeune photographe. « Je suis allé dans de nombreux territoires libérés par les forces armées », raconte l’homme de 59 ans, un sourire moqueur aux lèvres, « mais c’était la première fois que j’allais en Russie. »
Pour Yuriy Savchuk, l’enjeu était d’aller le plus vite possible. « J’étais peut-être le deuxième civil » à entrer là-bas, assure-t-il sans citer le premier. « C’était très excitant, c’était incroyable », affirme encore celui qui apparaît vêtu d’un gilet pare-balles et d’un casque dans une courte vidéo faisant partie du parcours. « Nous allions en Russie et rentrions le soir à Soumy [la région ukrainienne frontalière], ça a duré quatre jours », et cela malgré le risque posé par les bombardements.
« Nous ne faisons aucune revendication »
L’objectif de l’exposition vise à documenter les conséquences de cette offensive inédite sur le sol russe, déclenchée dans le secret le plus total. Cette opération, bien qu’elle n’ait pas fondamentalement changé le cours de la guerre, a porté un sérieux revers à la réputation du Kremlin, qui a vu une armée étrangère occuper une partie de son territoire pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale.
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