Alexis Goosdeel est le directeur de l’Agence de l’Union européenne sur les drogues (EUDA), le nouveau nom de l’Observatoire européen des drogues et toxicomanies. Depuis le 2 juillet, les compétences et les moyens de cette institution basée à Lisbonne ont été accrus pour affronter un phénomène de plus en plus massif et complexe. Le responsable belge analyse l’évolution récente des trafics et la vague de violence qu’ils entraînent.
Quelles sont les dernières tendances du trafic de drogue dans l’Union européenne (UE) ?
Les drogues sont partout et n’ont jamais été aussi disponibles. Les distinctions traditionnelles entre drogues dures ou douces, illicites ou non, d’origine végétale ou synthétique ne suffisent plus pour décrire la variété des produits qui circulent. Il existe désormais sur le marché des substances dont personne n’imaginait qu’un humain pourrait les consommer ou en devenir dépendant, or c’est le cas.
D’où proviennent essentiellement celles qui circulent en Europe ?
La cocaïne provient de Colombie, du Pérou et de Bolivie. L’héroïne d’Afghanistan, via la « route des Balkans », mais aussi, de plus en plus, via la « route du Sud », au départ des côtes iraniennes et pakistanaises, avec un transit en Afrique de l’Est et australe et dans la péninsule Arabique, les Emirats arabes unis en particulier. L’herbe de cannabis est essentiellement produite en Europe, mais on constate une progression du trafic en provenance d’Amérique du Nord, dont le Canada. Le haschisch vient surtout du Maroc, mais la production intra-européenne semble augmenter. On constate aussi un trafic croissant d’extraits à forte teneur en THC, ainsi que de substances semi-synthétiques en provenance d’Amérique du Nord. Les amphétamines sont essentiellement produites aux Pays-Bas, en Belgique et en Pologne, les méthamphétamines aux Pays-Bas, en Belgique, en République tchèque et en Slovaquie. L’ecstasy vient des Pays-Bas, de Belgique et un grand laboratoire vient d’être découvert en Espagne. A ce jour, quelque 950 nouveaux produits de synthèse ont été détectés sur le marché européen de la drogue, dont beaucoup sont des cathinones et des cannabinoïdes synthétiques. Ils proviennent principalement de Chine et, plus récemment, d’Inde. Ces dernières années, la production de cathinones synthétiques a également été détectée en Pologne et aux Pays-Bas.
Les Emirats arabes unis sont un havre pour les trafiquants européens, qui s’y enrichissent. On cite aussi fréquemment le cas de la Turquie. Que peut faire l’Europe ?
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