Un juge d’instruction a ordonné, mardi 24 septembre, un procès pour génocide et crimes contre l’humanité à l’encontre de Sonia Mejri, une « revenante » de Syrie et ex-épouse d’un émir du groupe Etat islamique (EI), a appris l’Agence France-Presse (AFP).
Sonia Mejri, née dans le sud de la France et âgée de 35 ans, est soupçonnée d’avoir, au printemps 2015, réduit en esclavage une adolescente yézidie en Syrie, alors qu’elle vivait avec son ancien mari, Abdelnasser Benyoucef, considéré comme l’un des créateurs, sous le nom d’Abou Al-Mouthana, de la cellule des opérations extérieures de l’EI. Présumé mort, il est toutefois visé par un mandat d’arrêt.
L’avocat de Sonia Mejri, qui a contesté les accusations à l’encontre de sa cliente tout au long de l’enquête, n’était pas joignable dans l’immédiat. Un juge d’instruction a aussi ordonné un procès pour M. Benyoucef pour génocide, crimes contre l’humanité et complicité de ces crimes ainsi que pour direction d’une association de malfaiteurs terroriste criminelle.
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Une « repentie convaincue », selon son avocat
D’après l’ordonnance de mise en accusation dont l’AFP a eu connaissance, le juge ordonne que l’ancien couple soit jugé devant la cour d’assises spécialement composée pour esclavage, emprisonnement, torture, viols ou complicité de viols, persécution et actes inhumains commis au préjudice de cette adolescente yézidie. Parmi ces actes inhumains, l’ordonnance souligne « la conversion forcée ou la tentative du couple pour y parvenir », telles que des « ablutions après les viols » imputés à M. Benyoucef sur l’adolescente.
Ce dernier a déjà été condamné en son absence en France pour l’attentat avorté de Villejuif de 2015. Il est présumé avoir été tué en 2016 dans la zone syro-irakienne par des frappes aériennes.
Sonia Mejri doit aussi comparaître pour participation à une association de malfaiteurs terroriste criminelle. Incarcérée à son retour de Syrie, elle avait témoigné lors de procès pour des crimes terroristes, des témoignages qui font d’elle une « repentie convaincue », avait assuré en mai auprès de l’AFP son conseil, Nabil Boudi.
Les investigations l’accablant se fondent notamment sur le témoignage d’une yézidie, aujourd’hui âgée de 25 ans, qui avait 16 ans quand elle a été achetée par Abdelnasser Benyoucef. Selon des éléments de l’enquête, dont l’AFP a eu connaissance, cette femme a dénoncé un quotidien de maltraitance. Elle a affirmé avoir été séquestrée pendant plus d’un mois au printemps 2015 en Syrie, qu’elle ne pouvait ni boire, ni manger, ni se doucher sans l’autorisation de Sonia Mejri. Elle a aussi accusé cette dernière de l’avoir violentée à deux reprises et d’avoir été au courant que son mari la violait.