Le nouveau premier ministre, Shigeru Ishiba, âgé de 67 ans, n’incarne pas un renouvellement des responsables politiques. Mais c’est un homme à poigne avec quarante ans d’expérience des arcanes du pouvoir, dont l’objectif, qu’il a toujours âprement défendu, est le renforcement de la défense du Japon. Tout en insistant sur l’importance de l’alliance avec les Etats-Unis, dont dépend la sécurité de l’Archipel, il entend la faire évoluer afin de donner au Japon plus de responsabilités et une plus grande indépendance.
Lui-même ancien ministre de la défense, M. Ishiba a nommé aux affaires étrangères un ancien ministre de ce ministère, Takeshi Iwaya, et à la tête du ministère de la défense le général Gen Nakatani, qui occupa déjà ses fonctions dans le passé (2014-2016), confirmant que la question du rééquilibrage de l’alliance avec les Etats-Unis – qu’il juge asymétrique – sera une priorité de son gouvernement.
« Je considère que ma mission est de faire évoluer l’alliance entre les Etats-Unis et le Japon afin de la mettre au niveau de celle entre les Etats-Unis et la Grande-Bretagne », écrit M. Ishiba dans un document publié fin septembre par le cercle de réflexion Hudson Institute, à New York. « Pour atteindre cet objectif, le Japon doit avoir sa propre stratégie militaire et devenir plus indépendant en matière de sécurité », a poursuivi M. Ishiba.
Renforcer les liens avec les pays voisins
Le premier ministre souhaite aller plus loin en matière de défense que ne l’avait fait son prédécesseur Fumio Kishida : coopération au niveau des commandements avec les Etats-Unis et augmentation (+ 7 %) des dépenses pour l’exercice fiscal 2025. Il entend également revoir le statut légal des forces américaines au Japon qui les soustrait souvent à la juridiction japonaise. Un message reçu avec froideur à Washington.
Au cours de campagne pour le poste de premier ministre, M. Ishiba avait déclaré à Naha, capitale de l’île Okinawa – où est installé le plus gros contingent des 53 000 soldats américains déployés dans l’archipel : « Le Japon est une nation souveraine, ne l’oublions pas. » Une revendication de souveraineté souvent « oubliée » des hommes politiques japonais lorsqu’il s’agit des Etats-Unis.
Pour M. Ishiba, le Japon doit aussi renforcer ses liens avec les pays voisins (en particulier la Corée du Sud). « Si on remplace la Russie par la Chine et l’Ukraine par Taïwan, en l’absence d’un système comparable à l’OTAN en Asie, en cas de guerre, il n’existe aucune obligation de défense mutuelle », estime M. Ishiba dans sa contribution au Hudson Institute. Aussi appelle-t-il à la création d’une alliance régionale, version asiatique de l’OTAN, en combinant dans un premier temps les alliances américano-japonaise et américano-sud-coréenne.
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