Le 25 octobre, Georges Ibrahim Abdallah devrait se lever à 4 h 30, comme il en a l’habitude depuis des décennies. Un moment de tranquillité qu’il occupe à regarder les chaînes d’informations en arabe, dans le centre pénitentiaire de Lannemezan (Hautes-Pyrénées). A 8 h 30, conformément à sa routine matinale, le septuagénaire libanais, condamné à la prison à perpétuité pour complicité dans l’assassinat, en 1982, de deux diplomates à Paris, l’un américain et l’autre israélien, descendra dans la cour de promenade. Il s’y livrera à ses exercices physiques quotidiens, avant de remonter dans sa cellule, pour prendre sa douche, lire et répondre à la vingtaine de lettres qu’il reçoit chaque jour.
Mais ce matin ne sera pas tout à fait comme les autres. Ce vendredi d’octobre marquera le quarantième « anniversaire » de la détention de Georges Abdallah. Une date au goût amer pour ce militant marxiste propalestinien, que la France a oublié depuis longtemps, mais dont le nom et le visage hantaient, au milieu des années 1980, les salles de rédaction, les prétoires et jusqu’aux plus hautes institutions de l’Etat. Le fantassin de la guerre de l’ombre qu’Israël et ses ennemis arabes se livraient à cette époque dans les capitales européennes est devenu, selon ses défenseurs, « le plus vieux prisonnier politique de France et même d’Europe ». Ses détracteurs voient plutôt en lui un terroriste, fier d’avoir tué le lieutenant-colonel américain Charles R. Ray, le 18 janvier 1982, et Yacov Barsimentov, deuxième secrétaire de l’ambassade d’Israël et probablement affilié au Mossad, le 3 avril 1982. Des assassinats perpétrés alors que les combats entre Israël et les fedayins de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), alors implantés au Liban, faisaient rage.
Libérable depuis un quart de siècle, le fondateur des Fractions armées révolutionnaires libanaises (FARL), un groupuscule proche du Front populaire de libération de la Palestine de Georges Habache, n’a jamais été libéré, en dépit de onze demandes en ce sens depuis 2001. Toutes ont été rejetées, en première instance, en appel ou en cassation, au motif que l’intéressé ne s’est jamais repenti de ses actes, qu’il se refuse à indemniser les familles des deux victimes, et que son retour au Liban constituerait un danger. Un argumentaire déployé sur fond de pressions des Etats-Unis et d’immixtion des pouvoirs publics dans la procédure. La seule fois où la justice française a validé en appel la demande de libération conditionnelle du vétéran de Lannemezan, en 2013, le ministère de l’intérieur, alors sous l’égide du socialiste Manuel Valls, y a fait obstruction en refusant de délivrer l’arrêté d’expulsion exigé par les magistrats.
Il vous reste 88.56% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.