Deux personnes migrantes sont mortes noyées lors du naufrage de leur embarcation, dans la matinée de mercredi 23 octobre, à un mile nautique (1,8 kilomètre) au large de Blériot-Plage (Pas-de-Calais), portant à 53 le nombre de victimes en mer, en 2024, lors de tentatives de traversées de la Manche. Vendredi, c’est le corps sans vie d’un nourrisson de 40 jours, originaire du Kurdistan irakien, qui avait été repêché au large du littoral. L’embarcation à bord de laquelle la petite Maryam Bahez se trouvait avec ses parents s’était déchirée en mer. Alors que 28 000 personnes sont parvenues à rejoindre le Royaume-Uni, la mortalité de cette route migratoire a décuplé puisque en 2022, année record où 45 000 personnes ont rejoint l’Angleterre, on déplorait cinq décès en mer.
Cette dangerosité accrue, le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, l’a soulignée dans un tweet du 3 octobre. Il y faisait état de sa rencontre au G7 avec son homologue britannique, Yvette Cooper, laquelle saluait « l’engagement héroïque des forces de l’ordre pour empêcher les traversées vers le Royaume-Uni ». « Nous avons aussi partagé le constat que cette efficacité avait des conséquences néfastes avec une augmentation des décès », a écrit le ministre français.
Depuis l’apparition du phénomène des small boats, fin 2018, ces bateaux ont toujours été de mauvaise facture, impropres à la traversée, et la prise de risque est majeure pour les migrants à bord. Au fil du temps, les passeurs ont en outre de plus en plus chargé ces canots pneumatiques mesurant moins de dix mètres, par appât du gain et au mépris de la vie humaine. Peut-être ont-ils été plus prompts à prendre des risques pour limiter les pertes économiques occasionnées par l’« efficacité » des forces de l’ordre à contrarier des départs en saisissant des canots avant leur mise en l’eau. Aujourd’hui, ce sont en moyenne près d’une soixantaine de personnes qui embarquent par small boat, contre une quarantaine en 2023 et une trentaine en 2022. Plusieurs naufrages sont récemment survenus avec plus de 80 personnes dans un bateau.
« Départs chaotiques et surchargés »
« Du fait des canots surpeuplés, le départ des embarcations est un moment critique », explique un matelot qui a travaillé sur des opérations de sauvetage et qui a requis l’anonymat comme tous les marins ayant fait du secours dans le détroit du Pas-de-Calais qui ont accepté d’échanger avec Le Monde et qui ne sont pas autorisés à communiquer sur les opérations. « Les passagers, toujours plus nombreux, sont par ailleurs de moins en moins pourvus de moyens de sauvetage élémentaires tels que des brassières de sauvetage », précise la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord.
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